par Daniel PAULY
Sea Around Us, Institute for the Ocean and Fisheries,University of British Columbia
Les AMP existaient naturellement
Les Aires Marines Protégées (AMP), en particulier les réserves marines intégrales, le modèle le plus efficace, sont souvent critiquées par les "lobbying" de la pêche industrielle (commerciale et récréative) comme une leçon artificielle données aux pêcheurs, par des intellectuels écologistes radicaux.
Cela serait vrai si les AMP étaient une invention récente.
Cependant, les AMP, qu'elles soient explicites, sous la forme de réglementations officielles ("il n'y aura pas de pêche dans ce lieu"), ou implicites, dans les zones où il n’était pas possible de pêcher (à cause de l’éloignement des côtes, des trop grandes profondeurs, ou des conditions de mer trop rudes) existent depuis aussi longtemps que la pêche existe.
Ces coffre-forts naturels ont été largement entamés
Les contraintes sociales et naturelles, qui protégeaient jusqu’alors les populations de poissons, de la même manière qu'un coffre-fort protège l'argent dans une banque, ont été surpassées par l'injection massive d'énergies fossiles dans les pêcheries, en constante expansion (des bateaux à vapeur aux chalutiers à moteur diesel, de la pirogue de pêche aux moteurs hors-bord, de la conservation du poisson salé et de la consommation locale aux poissons pêchés localement et exportés vers des marchés lointains et insatiables).
Ce nouvel accès aux coffres-forts, ou réservoirs de la nature, ne peut être contré qu'en créant de nouveaux coffres-forts, où au moins une partie du capital de la biodiversité pourra être protégée et régénéré, jusqu'à ce que nous apprenions à extraire uniquement l'intérêt, ou le surplus, de ce capital naturel.
Un espoir avec la création de nouvelles AMP
Jusqu'aux années 2000, l’expansion des zones protégées était faible, et aucun des objectifs ambitieux fixés en matière de protection des océans ne semblait pouvoir être atteint, en particulier en ce qui concerne les zones de protection intégrale.
Cette dynamique a changé depuis la création d'une gigantesque réserve marine intégrale autour des îles hawaïenne du Nord-Ouest, suivie par d’autres dans les océans Pacifique et Indien, puis Atlantique.
La recherche sur les AMP a également progressé.
Elle a non seulement confirmé leur «effet de débordement» systématique autour des AMP qui profite aux pêcheries, mais également documenté leur effet d’atténuation du réchauffement climatique sur les océans.
Les recherches montrent la possibilité d'un effet sur la génétique des poissons au sein des grandes réserves marines intégrales, conduisant à la (re)constitution d’une population de poissons résidant dans les zones protégées interdites à la pêche.
Contact: Daniel PAULY, University of British Columbia, 2202 Main Mall, Vancouver, Canada, V6T 1Z4 ; email: d.pauly@oceans.ubc.ca